Critique Les Algues Vertes : scandale agricole en Bretagne

Published 2024-02-16 00:00:00

Dix-neuvième long-métrage du réalisateur Pierre Jolivet, Les Algues Vertes se présente comme un film fort, levant le voile sur une omerta d’ampleur dans le milieu agricole. Un sujet d’une importance capitale donc, mais cela suffit-il à en faire un bon film ?

Adaptation de la BD éponyme, elle-même retraçant une vraie enquête de journaliste, Les Algues Vertes prend place en Bretagne, dans la baie de Saint-Brieuc. On y suit Inès Léraud (Céline Sallette), journaliste réalisant des documentaires audios pour la radio. Elle et sa compagne Judith (Nina Meurisse) viennent de s’installer dans le hameau de Coat Maël, car Inès enquête sur des problèmes liés aux traitement des algues vertes. Une affaire qui cache en effet un secret si imprononçable que le film a provoqué de nombreux débat houleux en Bretagne, même au niveau des politiques.

Critique Les Algues Vertes : scandale agricole en Bretagne
©haut et court

Le film a donc une grande ambition : diffuser à grande échelle ce scandale que l’on peu presque qualifier de scandale d’état. On apprend en effet que, grossièrement résumé, les algues vertes sont engendrées par l’agriculture intensive, et ces dernières, en pourrissant, relâchent de l’hydrogène sulfuré. Ce gaz hautement toxique est donc responsable de la mort de centaines d’animaux et de quelques humains sur les plages et sur les côtes. Sur ce point, le film est réussi. Le message passe, on comprend toutes les arcanes et les enjeux de cette affaire : Les Algues Vertes est on ne peut plus limpide.

Vert mais pas vivant

Mais c’est également cette ambition de « film à message » dans laquelle Pierre Jolivet s’est embourbé qui amène la plupart des défauts du film. Passé les premières impressions où l’on est choqué par le scandale, on se rend vite compte de la pauvreté esthétique et narrative du métrage. Les scènes en extérieur nous montrent certes de jolis paysages, mais les cadres restent cependant peu travaillés. Les scènes d’intérieur quant à elles bénéficient d’une lumière qui paraît artificielle, on ressent les projecteurs implantés pour reproduire la lumière du soleil à travers une fenêtre.

Critique Les Algues Vertes : scandale agricole en Bretagne
©haut et court

Les acteurs sont aussi une faiblesse du film, la faute à une écriture rigide, et une direction d’acteur qui a dû l’être tout autant. Le casting incarne en effet plus des dialogues que des personnages, ils n’ont qu’une fonction de récitation de discours. Ce qui donne à leurs interactions un aspect froid, presque robotique, surtout lorsqu’ils parlent de l’enquête d’Inès. Cela sert donc l’ambition du film : par ses personnages désincarnés, le message des Algues Vertes passe mieux, puisqu’il n’est pas sujet à une quelconque forme d’émotion, l’exposition est alors la plus pure.

Un objectif mené à bien

Cependant, tous ces éléments contribuent à faire du film plus une plaidoirie qu’une œuvre cinématographique à proprement parler. En effet, avec l’ambition de faire porter à un film la révélation d’un lourd secret, on en oublie le principal : faire du cinéma. Pierre Jolivet n’a donc pas voulu créer une œuvre du septième art, il a simplement mis en scène une histoire, sans penser la manière de la raconter. Or, c’est tout l’intérêt du cinéma que de savoir de quelle manière on va nous exposer des faits, sinon pourquoi ne pas simplement lire la BD, ou même écouter les enquêtes originales de la journaliste ?

Critique Les Algues Vertes : scandale agricole en Bretagne
©haut et court

On voit ici l’intérêt des Algues Vertes : toucher un public le plus largement et clairement possible. La mise en scène épurée et sans recherche esthétique, les dialogues robotiques et millimétrés dans l’écriture, la narration d’une simplicité exemplaire, tout ceci participe à l’objectif du film, en le rendant plus accessible à tous. Une forme plus expérimentale et moins grand public, tel que le documentaire qui paraît plus adapté à première vue pour ce sujet, aurait empêché le film d’achever son ambition comme il le fait à merveille. Car on aura en effet entendu parlé des Algues Vertes cet été, sixième au box office français la semaine de sa sortie, et au total un tiers des entrées ont été comptabilisées en Bretagne, région concernée par le film.

Critique Les Algues Vertes : scandale agricole en Bretagne
©haut et court

Donc, si vous avez loupé sa sortie cet été, et que l’écran au papier, la prochaine sortie en DVD des Algues Vertes arrive à point nommé. Il suffira d’1h50 devant votre télé pour apprendre tout les ressorts de cette affaire, compréhensibles même pour les plus jeunes. Une bonne séance de cinéma en famille donc, qui même si elle n’apportera pas de grande expérience esthétique, offrira une nouvelle compréhension de l’industrie agroalimentaire bretonne. Qui plus est si on regarde le court-métrage Mona Lisier réalisé par Clode Hingant et présent sur l’édition physique. Ce dernier nous expose avec un certain humour le problème de l’épandage, à l’origine des algues vertes. Un coffret DVD (que l’on fait gagner dans un concours ici) qui est donc complet et documente bien son sujet, mais qui n’apporte pas grand-chose au cinéma.

Les Algues Vertes sort en DVD, Blu-ray et VOD ce mardi 21 novembre

AVIS

Un film utile, intéressant, mais franchement moche et peu important pour le cinéma. A voir quand même, car le problème des algues vertes reste trop peu connu, et mériterait beaucoup plus d'attention. Lecteurs bretons, vous arrêterez vite de boire l'eau de votre robinet !

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Source : linfotoutcourt.com

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